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“Je l’ai un peu vu comme un accélérateur de particules”
En ce mois de juin 2024, nous sommes partis à la rencontre de Jérémy Maucour. Un jeune Montalbanais (Montauban-de-Bretagne), il s'envole vers la Belgique, où il suit une formation en cinéma à l'Institut des Arts de Diffusion. Là-bas, il réalise deux courts-métrages qui mêlent humour absurde et angoisse existentielle, dont "Phalène" son film de fin d'études qui inaugure une série de projets qui s'intéressent à la vie dans les territoires périurbains. À côté de ça, le projet "48.34242 - 3.99635, quelque part" s'intéresse à la fête en milieu rural (teuf / rave party), à travers une petite balade de santé nocturne dans la campagne bretonne de deux jeunes femmes.
Est-ce que tu peux te présenter ? Ton parcours dans le cinéma ?
Je m’appelle Jérémy Maucour, je suis originaire de Montauban de Bretagne en Ille-et-Vilaine. Il y a un peu moins de 10 ans, je suis parti en Belgique pour faire une école de cinéma qui s’appelle l’Institut des Arts de Diffusion (IAD) en section réalisation en master (5 ans) et depuis je travaille à la fois sur mes projets de film perso et je fais aussi d’autres postes, que ce soit en scénario, en casting ou en assistanat.
Jérémy Maucour à Trégor Cinéma - octobre 2023
Pourquoi avoir participé aux Courts d’Armor 2023 ?
C’est un peu un luxe de pouvoir travailler deux semaines comme ça sur son projet et surtout de pouvoir échanger et rencontrer des gens que ce soit après la résidence, donc être mis en contact avec des prods ou sur le coup pouvoir rencontrer du monde et ne pas être seul dans son écriture.
Peux-tu me parler de ton court-métrage ?
C’est une comédie absurde qui parle de deux jeunes femmes qui errent en pleine campagne à la recherche d’une free party dont elles n’entendent que l'écho, donc ça se passe en pleine nuit. Plus elles croient se rapprocher de la free party, plus le son change de direction et au fur et à mesure qu'elles se perdent dans la nuit. Cette situation va les mettre à l’épreuve et un petit peu venir bousculer leurs convictions.
Pourquoi vouloir raconter cette histoire, d’où t’es venue l’idée de départ ?
Ça m’est arrivé un soir avec un ami, on a passé des heures à chercher une teuf comme ça, comme deux cons en pleine nuit et après coup, je trouve que cette situation était assez poétique finalement. Elle devrait être intéressante si je l’extrapolais un peu, si tout à coup l’objectif de trouver cette teuf était un peu une question de vie ou de mort, ça permettait d’élargir le propos à des questionnements plus politiques et existentiels. Cela parle aussi de mes expériences en free party en Bretagne ou en Belgique. L’envie d’en parler, mais pas d’abord de parler de la free party en elle-même, mais plutôt de ce qu’elle représente chez les gens qui y participent. En fait moi, je trouve assez belle l'opiniâtreté dans le courage des teufeurs et des teufeuses prêts à parcourir je ne sais pas combien de kilomètres pour se retrouver à une teuf et du coup au final, qu’est-ce qu’on recherche là-dedans, pourquoi on est prêt à faire tout ça. Donc, il y a un sens politique et personnel aussi.
Quelles étaient les questions que tu te posais avant d’intégrer la résidence ? Des appréhensions ?
Ce n'est pas forcément que j’appréhendais parce que je suis toujours partant pour des expériences. J’ai un rejet un peu de tout ce qui est théorie classique du scénario dans le sens où j’ai toujours peur de tomber sur des gens pour qui c’est une bible dont on ne peut pas vraiment sortir, qui insistent tout le temps sur l’objectif des personnages. Il y a une manière d’écrire des scénarios qui me fait un peu peur, par exemple qui consiste à parler “d’arène” pour le contexte, avec toujours des termes de combats. Je sais qu’il y a beaucoup de gens qui se réfèrent à ça avec une manière d’écrire assez américaine et donc ce n'était pas vraiment une peur, mais j’essaye de faire toujours un peu gaffe à ça. Je ne suis pas du tout fermé parce que je pense qu’il y a des choses à piocher un peu partout, juste peur que cette résidence soit trop dogmatique.
Jérémy Maucour à Trégor Cinéma - octobre 2023
Ton expérience en résidence d’écriture ? Que t’a apporté la résidence ?
Ça a été vraiment bien dans mon cas, déjà pour du court-métrage, il y a assez peu de dispositifs comme ça, c’est un peu un luxe d’avoir deux semaines dans un cadre comme celui-là pour ne penser qu'à ça. Et aussi un luxe d’être dans l’échange constant pour l’écriture du scénario. Je l’ai un peu vu comme un accélérateur de particules. Parfois, tu peux passer deux mois sur un scénario et là être avec quelqu’un avec qui tu échanges constamment, fait que tu peux l’améliorer beaucoup plus vite. Moi, j'ai eu la chance d’avoir été encadré par Sonia Larue avec qui ça s'est super bien passé et qui m’a très bien encadré.
Comment a évolué ton rapport à l'écriture depuis cette résidence ?
C’est assez personnel, mais j'ai tendance à aller assez vite dans l’écriture de scènes sans trop réfléchir, parce que j’ai l’impression que j’ai besoin de ça pour rentrer dans mon imaginaire ou le tester. J’ai un peu de mal avec l’aspect de structure, donc la résidence m'a un peu plus donné une rigueur de travail par rapport au passé. C'est bien de s’imposer une certaine rigueur et une structure au film pour ne pas trop se perdre ni perdre de temps. Je réfléchis un peu plus, en tout cas, je le ressens avant d’écrire. Je ne pense pas qu’il faut sacraliser la structure, mais je la perçois plus comme un socle maintenant, qui permet de ne pas se perdre, comme une boussole.
Quel conseil pourrais-tu donner aux personnes qui voudraient se lancer dans l’écriture ?
S’entourer de bonnes personnes qui peuvent faire des retours sur le scénario, qui peuvent aider à l’écriture. Surtout s’entourer de personnes qui comprennent notre propre sensibilité.
Le mot de la fin ?
Merci Fred et Sonia et voilà !